Témoignage de Mr. X
Ou De l’Usage du Vélo Electrique Aujourd’hui
J’ai souhaité partager avec vous des éléments de réflexion sur le vélo électrique à travers le témoignage d’un de ses utilisateurs les plus zélés : Mr X.
Il nous raconte : -pourquoi il a choisi ce moyen de transport (oui je dis bien moyen de transport à part entière !) ;
-quelle utilisation il en fait ;
-nous donne quelques éléments techniques pour évaluer son utilité et sa rentabilité économique et écologique ;
-ainsi que quelques conseils pour un bon usage de cette technologie.
Mister X a choisi d’utiliser son vélo électrique (vélo couché équipé d’un moteur pédalier en kit) pour TOUS les déplacements du quotidien. Il ne possède à l’heure actuelle aucun autre véhicule, donc aucune voiture.
« Je vais travailler avec (11km), 20 minutes aller, 20 minutes retour. Je vais faire mes courses (15km), Je fais facilement, si je dois aller voir des amis, jusqu’à 50/60 km. C’est assez facile à faire. Je l’utilise par tous les temps, s’il pleut, s’il y a de la neige, du verglas. On s’équipe pour ! ». Pour la neige et le verglas, pneus clous ! Pour le froid « en gros c’est l’équipement de ski alpin, ce n’est pas un souci et on a pas besoin de dégivrer le pare brise. » Il faut certes prévoir quelques minutes pour s’équiper et déséquiper au départ et à l’arrivée.
« L’assistance électrique c’est vraiment super, même si on est un peu fatigué, on ne se pose pas de questions, on prend le vélo et les côtes, ça passe quand même. C’est un sport très doux, ça équivaut à une marche à pieds. Ça permet d’arriver chez soi en ayant fait une petite activité, d’être plus détendu ; un petit sass entre le boulot et la maison. »
La vitesse moyenne du vélo électrique est de 25km/h (vitesse limite légale). A peu près la moitié de la voiture.
« Jusqu’à une demi heure de trajet je trouve que c’est facilement faisable tous les jours. Je peux faire des trajets de plusieurs heures pour aller voir des amis. C’est aussi le plaisir de faire du vélo. Ce n’est pas du temps perdu car je considère que je fais une activité sportive agréable par la même occasion. Je peux transporter jusqu’à 25/30 kg avec une remorque. Je transporte facilement 50 kg pour mes livraisons, sur 100 km de distance. Après c’est une autre organisation c’est sûr. Quand je fais jusqu’à 100 km, il faut prendre le temps, et souvent j’en profite pour m’arrêter chez des amis. Quand on commence à faire des grandes distances, il faut s’organiser autrement. Mais ça permet de prendre le temps d’aller voir les copains ! »
« Mon critère au début, quand j’ai décidé de me débarrasser de ma voiture c’était : de quoi ai-je vraiment besoin chez moi ? Est-ce que je peux par exemple, sans voiture, aller chercher une bouteille de gaz ? La remorque permet de répondre à ces besoins là. Pour les courses jusqu’à 10/15 kg, les sacoches suffisent. »
Quel est le leitmotiv qui a poussé Mister X à faire le pas ? A choisir de mener sa vie au rythme du vélo ?
« Quand j’étais jeune, autour de 15 ans, mon moyen de transport c’était le vélo, pour aller voir les copains. On en faisait aussi avec mes frères. Je pense que j’ai gardé quelque chose de cette liberté de déplacement. En 2006-2007 j’ai vraiment pris conscience de la gravité du changement climatique. J’ai voulu convaincre les gens et je me suis beaucoup heurté à eux, les gens en face m’en envoyaient plein la gueule, j’ai eu de gros conflits, on me traitait d’intégriste de l’écologie... !
Quand je me suis mis au vélo, je ne cherchais plus à convaincre personne. C’était quelque chose qui me correspondait, qui sonnait vrai pour moi. En le faisant je me sentais vraiment bien. Je pense que grâce à ça les détracteurs ont senti qu’ils n’avaient plus de prise sur moi, que leurs remarques n’allaient plus me toucher. C’est quand on est pas sûr de soi, quand on a des doutes, que l’on reçoit un regard négatif sur soi. »
« La meilleure façon de changer les choses, c’est vraiment d’être bien avec ce qu’on fait ».
« On marche sur la tête. On est en train de s’autodétruire. L’humanité semble être comme ça, comme « immature ». On est des grands enfants qui expérimentent, des adolescents qui faisons un peu n’importe quoi. On est malheureusement en train de casser un peu plus que nos jouets. Mais bon l’humanité est comme ça, c’est peut-être l’évolution de la vie... On ne mettra pas la vie en danger sur Terre. Mais il y a toute une beauté qui disparaît. Une biodiversité, et la beauté de l’humain. Personne ne veut faire de mal, on est tous attachés aux gens autour de nous. Et je suis comme les autres. Mais la plupart des gens sont déconnectés, ne prennent pas de recul, c’est humain. »
Monde hyperconnecté, complètement déconnecté ?
Les enfants autour de Mr X ne connaissent plus, la plupart du temps, les phases de la lune, le lien entre la viande et l’animal, la nécessité du végétal dans tout ce que nous mangeons. Beaucoup d’études montrent que c’est ce lien rompu avec la connaissance de la nature qui explique en grande partie cette immaturité et cette absence de conscience écologique. On ne fait plus suffisamment le lien entre nous et le contexte naturel qui nous entoure, comme si nous en étions indépendants. Alors que nous en sommes partie intégrante, et surtout, nous en avons un besoin vital ! Sans parler des déséquilibres psychologiques que cela engendre, besoins de conpensation, de consommation. Les milieux écolos eux-mêmes sont victimes de cette dépendance.
La philosophie écologique ne suffit plus, notre niveau de vie nous piège de toute façon dans une dépendance à la consommation, qu’elle soit éthique, bio, ou pas. Et nous sentons bien que ce n’est pas ça qui nous rend heureux.
Mr X « J’ai fait le choix de moins travailler. Du coup je consomme moins. Je prends plus le temps de réfléchir et j’achète moins de conneries.
De quoi se plaignent les gens de toute façon ? Quelle est la chose qui leur manque le plus ? Si vous demandez autour de vous la plupart des gens vous répondront : LE TEMPS. Pourtant tout le monde a le même temps. Tout le monde a 24h par jour. Je me suis rendu compte du trésor immense que cela représente d’avoir du temps. Je travaille à mi-temps et je peux faire les choses qui me correspondent. »
S’approprier une technologie
Mr X : « Le fait de bien utiliser la technologie nous permet de nous libérer énormément de temps en ayant très peu de contrainte. Par exemple avec les connaissances que l’on a aujourd’hui on serait capable de faire une agriculture propre. La technologie ; qu’est ce que ça me coûte et qu’est ce que ça m’apporte ? Le smartphone par exemple nous permet d’acceder à l’info ou l’action désirée sur le champ, mais à quel prix ? Une pensée perpétuellement hâchée, surchargée d’infos et d’objectifs, hyperstimulée. On est en train de détruire un système social qui fonctionnait pas trop mal, un système de retraite qui fonctionne par répartition sur la base de la solidarité et personne ne réagit, car notre pensée est déjà surchargée » (il y a bien sûr d’autres raisons à cette acceptation).
« Il faut se poser la question de ce que nous apporte chaque technologie, et de ce qu’elle nous coûte. De ce qu’on est prêt à accepter pour l’avoir. Un smartphone c’est quelques kilos de déchets électroniques, est-on prêt à avoir ça dans son jardin ? Est on prêt à accepter que cette pollution soit subie loin de nos yeux par des Africains ? »
Une technologie doit être à notre service et pas l’inverse, et elle implique d’en prendre soin, de tout faire pour la faire perdurer, pour limiter son impact.
« La voiture on l’a, ça a un coût monstrueux et ça nous demande de travailler beaucoup mais on s’est habitué, on l’a devant la maison, on peut aller à droite à gauche sans se poser de question. Avec le vélo c’est une autre forme de liberté : certes le jour où il fait très mauvais on est parfois obligé d’annuler des rendez-vous, mais ce que l’on ne dit pas c’est que grâce aux économies effectuées, à un rythme plus posé, il y a plein de journées dont on peut profiter que d’autres passent à travailler ! »
Cela pose la question de nos rythmes de vie et de notre besoin (ou pas ?) de temps hors travail : de temps passé à s’occuper de soi, à réfléchir, à s’occuper de nos enfants, à développer nos aptitudes et notre autonomie.. ! Ou simplement à faire ce qui nous plaît... « Il est toujours possible, par ailleurs, de partager l’utilisation d’une voiture pour palier à l’indispensable, si l’on ne peut vraiment pas s’en passer pour certaines choses (santé, travaux...) Mais déjà on pourrait diviser par 10 notre consommation d’énergie, et là on serait bon : on pourrait absorber notre pollution liée aux déplacements. » C’est une question d’utilisation optimale de la technologie qui nous est donnée, et non pas de son usage inconscient et débridé.
Un vélo électrique est 30 fois moins lourd qu’une voiture, pour transporter à peu près l’équivalent d’une voiture sur nos trajets les plus fréquents. Il y a une pollution générée par la fabrication des moteurs et batteries du vélo : certes, mais pour une voiture aussi ! Il ne s’agit pas de rajouter un vélo aux autres véhicules, mais si déjà le vélo remplace un des véhicules du foyer (en 2018, 39 % des foyers français en possèdent 2 (source cabinet d’études Kantar)), cela pourrait faire une différence.
La question de la batterie
Le moteur en lui-même s’use assez peu. La batterie contient des minerais assez problématiques. Mais elle est bien moindre que celle d’une voiture. Elle a un impact, mais que l’on peut minimiser en l’utilisant bien.
Au bout de 4 à 6 ans il faut changer la batterie, selon la qualité de l’entretien.
Il faut faire au minimum 1000 km par an pour rentabiliser la batterie d’un point de vue écologique, et ces trajets doivent remplacer ceux que nous ferions en voiture. C’est assez facile à atteindre si on est un peu régulier.
Si le vélo remplace complètement la possession d’une voiture, c’est rentable immédiatement.
« La batterie reste un point délicat : il faut l’entretenir. Sans faire attention elle va finir sa vie au bout de 3/4 ans. En en prenant soin 6 à 8 ans. » Il est important de s’approprier des connaissances sur la batterie : manière de la charger, de la stocker. Ce sont des connaissances assez simples en électricité. Il y a énormément à gagner avec un petit effort d’apprentissage. C’est ce que j’appelle la règle des 20/80. 20 % d’énergie, d’effort pour acquérir des connaissances, permet de bénéficier de 80 % du potentiel d’efficacité de la technologie. »
Quelques exemples : -Pour conserver la batterie, le plus optimal est qu’elle soit à moitié chargée. Si on sait qu’on ne va pas l’utiliser un certain temps, il faut donc la laisser à moitié chargée.
-Éviter de la charger à 100 % quand on sait qu’on aura pas besoin de toute la charge.
-Éviter de la décharger complètement.
Quid des enfants en vélo électrique ?
« J’ai un ami qui a fait le choix d’habiter près de son boulot, de l’école et des activités des enfants, pour permettre de faire la plupart des trajets à vélo. Dans le Trièves une famille avec deux enfants arrive à vivre sans voiture. »
La dimension familiale semble être un obstacle majeur au fonctionnement à vélo, en particulier à la campagne. Cela pose une question essentielle : est-il cohérent de vivre loin de notre lieu de travail et des services ? Comment peut-on favoriser un rapprochement ? Certaines personnes renoncent à vivre à la campagne pour ces raisons et y trouvent finalement leur compte : elles profitent de la nature et de la montagne en se déplaçant, mais la plupart de leurs trajets du quotidien se passe de voiture. Il existe bien sûr des remorques à une ou deux places qui permettent de transporter les enfants (tant qu’ils ne sont pas encore trop lourds !) puis des systèmes pour tracter le vélo des plus grands.
Tout va de pair : par exemple il faut se battre pour conserver nos transports scolaires ! Car sinon la plupart des trajets, il faut bien le reconnaître, nous les faisons seuls.
A vous de voir !
Un petit topo de conseils techniques de Mr X à venir dans la rubrique Construire...